mercredi 29 décembre 2010

Le coaching vu par les consultants : encore quelques zones d'ombre...

Lors de la rédaction du billet Coaching ce mystérieux métier, j'ai interrogé les consultants de Breizh Conseil. 17 d'entre eux ont bien voulu me faire part de leur perception et expérience du coaching, avant qu'ils ne puissent lire ce premier billet.
Vous trouverez ici : la compilation de leurs réponses, mes commentaires sur quelques éléments récurrents, et une conclusion sur les possibilités et risques d'une mixité des postures coach / consultant.
Puis vos propres remarques, si cela vous dit...

1) Les réponses des consultants

Mes commentaires sur les réponses

1. Pour vous, le coaching est une démarche individuelle :

Pour beaucoup, le coaching vise au développement de la personne, alors que le conseil s'attache plutôt au développement de l’entreprise, de l'organisation.

C'est essentiellement vrai, si l'on parle du "sujet" avec lequel on travaille dans l'ici et maintenant de la séance. Ça l'est moins si l'on parle de la perspective dans laquelle on se situe, des impacts visés du coaching. Dans une logique de coaching systémique, c'est tout le « système client » qui va bouger, via l'action de la ou des personnes que l'on accompagne dans cette organisation.

S'il semble y avoir opposition entre l'intérêt de la personne et celui de l'organisation, une exploration plus fine avec le client est nécessaire. S'agit-il d'une opposition objective, ou bien d'une perception qui pourrait être résolue par une réorganisation des règles du jeu ?
Mais en effet, le coach ne travaille toujours que sur les intentions et possibilités d'action des clients qu'il a en face de lui. D'où l'intérêt dans certains contextes des modalités de coaching de groupe qui permettent d'agir directement au niveau collectif.

2. Pour vous, le coaching relève d'une durée flottant

Deuxième représentation grandement partagée : une perception différente du temps, une mission de conseil serait clairement bornée dans le temps, alors qu'un coaching pourrait durer... tant que de besoin.

Le billet précédent a montré qu'il n'en était rien. Qu'il s'agisse de conseil ou de coaching, une mission est cadrée dans le temps, ce qui n'empêche nullement que le client soit ultérieurement demandeur d'une nouvelle intervention pour aller encore plus loin.

3. Le coaching, c'est tout et n'importe quoi

Certains décrivent le coaching comme "gadget à toutes les sauces". C'est malheureusement vrai dans les media, et l'utilisation de ce terme par des "coachs en image", des "coachs en cuisine" et des "coachs minceur"... en plus des coachs sportifs, peut troubler le professionnel en quête de coaching professionnel. Certains "auteurs" (que je préfère ne pas citer), profitent de ce constat pour mieux partager leur propre confusion. La très sérieuse fédération ICF reconnaît en son sein le "coaching de vie", tout aussi respectable. Il est donc peu probable que ce titre soit un jour protégé. Dont acte, d'où la nécessité de la rencontre qui concluait le premier billet.

4. Le coach serait un « Gourou »

Le temps flottant (point 2) est souvent associé à la dépendance imaginée entre coach et coaché, de nombreux consultants associent spontanément coach et "Gourou", éminence grise, personnage influent (personne n'a cité Machiavel, mais il me semblait proche de ces images).
Il y a effectivement de nombreux exemples de personnages qualifiés de coach mais dont la motivation réelle est le pouvoir sur autrui, la posture une posture de supériorité, en recherche d'admiration, envers sa personne ou sa méthode, ou la confusion des deux.
Les exemples les plus médiatiques, de fait, nourrissent cette représentation, puisque par définition les coachs qui se situent en position humble à côté de leur client, voire derrière, ne cherchent pas les feux de la rampe.
Ceci dit, il existe certainement une place, voire un marché, pour  ces experts en stratégie, en communication, en influence. Et certains peuvent probablement exercer avec une réelle éthique. Mais c'est un autre métier.
5. Certains ont vécu le coaching comme une « épreuve », parfois violente

Des consultants s'imaginent un peu coachs quand ils "bottent le cul" de leur client, car ils se sont parfois fait "remuer" par des intervenants dénommés coachs et dont la mission était semble-t-il de "secouer le cocotier" pour vérifier qui tenait aux branches. Ce n'est bien entendu pas notre posture.

J'imagine que le lien se fait aussi dans leur esprit car il s'agit de relations dans lesquelles le registre émotionnel est aussi présent que le registre rationnel, et que ce terrain semble moins légitime pour le consultant. Si le coach est particulièrement entraîné à accompagner son client sur ces terrains, il n'en a heureusement pas le monopole, un consultant et un manager sont aussi des êtres humains à part entière, et c'est le cadre contractuel et leur style d'intervention qui définissent l'appui plus ou moins explicite sur ces registres (le cœur, les tripes), dans leur action.
Un coach peut naturellement utiliser sa propre énergie pour "faire réagir" le client ; mais jamais sur un mode manipulatoire ; il aura toujours à cœur de passer immédiatement au niveau "meta" pour explorer les effets de ce mode d'expression avec son client, lui redonner l'initiative.

6. Pour vous, le coaching serait un cadre où se confier, un lieu où être soutenu

Oui, mais "pas que". Nous avons abordé cette question de la dimension "psy" dans le précédent billet, et nous devrons sans doute y revenir, peut-être après avoir interrogé quelques psychothérapeutes ? Voilà une bonne idée, peut-être pour un prochain billet ?

7. Quand un consultant pense faire du coaching, il appelle ça "accompagnement"

Reconnaissons simplement que ce vocable "Accompagnement" est encore plus polysémique que celui de coaching. Donc pourquoi pas, mais là encore il suffit que l'engagement mutuel décrit dans le contrat d'intervention (ou l'accord implicite) soit suffisamment clair pour les deux parties.
Cette réponse se voulant synthétique, et ce sujet ayant fait l'objet de nombreux écrits, un prochain billet sera spécifiquement consacré à l'accompagnement.

Conclusion : Un consultant fait-il (parfois) du coaching ?

J'avais essayé il y a quelques temps de décrire le plus clairement possible le coaching TMC.

Aider un manager à prendre de nouvelles responsabilités, faciliter le passage de relais entre un cédant et un repreneur, augmenter la cohésion et la capacité d'agir d'un comité de direction ou d'un groupe projet peuvent se faire de différentes manières, soit en "éclairage d'expert", soit en "mode coaching", ou encore selon des cadres et modalités d'intervention  plus "ad hoc".

En tout cas, il est souhaitable que les modalités d'intervention et les résultats attendus soient les plus clairs possibles,  en des termes qui permettent de convenir avec le client de ce que nous faisons - et de sa propre part du travail à accomplir..

Une intervention de conseil peut contenir par moments des interactions de type coaching avec le client, avant de revenir à une implication plus forte du consultant dans la définition des objectifs du client et la façon d'y parvenir. Par contre, la tentation que pourrait avoir le coach de commencer à influencer les perceptions, objectifs et choix du client me semble plus dangereuse, car elle met en question la posture même de coach telle que définie dans le premier billet, à l'opposé du "gourou", dans le sens cité plus haut.

2 commentaires:

  1. Super!
    Un bien bel article sur une question qui n'a pas fini d'être posée et sujette à débat.

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  2. Très beau billet qui contribue à faire avancer la réflexion sur les métiers de coach et de consultants, sur toutes les formes d'accompagnement en organismes professionnels.

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