Oui, nous avons des lunettes colorées quand nous observons le monde, et notre subjectivité nous fait ressentir plus profondément les instants de mal-être que prendre conscience de nos instants de bonheur. Quoique la conscience du bonheur soit aussi une question d'entraînement, mais c'est une autre histoire.
La seule limite que je perçois à cette réflexion est son caractère individuel : moi face à mon travail, mon travail et moi. Et l'autre / les autres ?
Nos prédispositions intérieures nous permettent d'estimer l'utilité, la qualité, la beauté de notre travail, et des occasions d'auto-gratification, de fierté de ce que nous accomplissons, quelle qu'en soit l'échelle. Mais nous travaillons avec et pour d'autres, en lien avec d'autres, et j'aimerais donc compléter le « plaisir au travail » par le mot « ensemble ». Car face à un manager critique perpétuel, face à des collègues qui « jouent perso », à des acheteurs de mauvaise foi, il est difficile d'entretenir sa petite bulle de bonheur dans un océan de vacheries.
Nos prédispositions intérieures nous permettent d'estimer l'utilité, la qualité, la beauté de notre travail, et des occasions d'auto-gratification, de fierté de ce que nous accomplissons, quelle qu'en soit l'échelle. Mais nous travaillons avec et pour d'autres, en lien avec d'autres, et j'aimerais donc compléter le « plaisir au travail » par le mot « ensemble ». Car face à un manager critique perpétuel, face à des collègues qui « jouent perso », à des acheteurs de mauvaise foi, il est difficile d'entretenir sa petite bulle de bonheur dans un océan de vacheries.
Reste à imaginer comment les graines de plaisir au travail, de joie de vivre au travail, peuvent être cultivées, entretenues, et essaimer au sein d'une organisation. Donc a minima valorisées, reconnues.
Pour moi naturellement, cela passe par le développement de la collaboration, qu'elle soit horizontale, verticale, diagonale, aléatoire, spontanée... que ce soit dans un objectif d'efficacité collective, de partage d'expérience, d'innovation... ou de qualité de vie au travail, objectif difficilement dissociable des précédents.
Cet essaimage du plaisir de travailler est une partie de l'art de manager, y compris dans la capacité à accepter de ne pas tout contrôler, car il serait étonnant d'arriver à tayloriser le plaisir de travailler.
Pour approfondir les liens entre contributions, reconnaissance et collaboration, je vous invite à lire le papier de Christophe Dejours « Coopération et construction de l’identité en situation de travail », mise en ligne en mars 1993 dont je ne résiste pas au plaisir de recopier ici le dernier paragraphe :
Ainsi peut-on conclure que la souffrance dans le travail n’est pas sans issue ; que la coopération est une médiation nécessaire pour transformer la souffrance en sens et en plaisir ; qu’enfin santé au travail et qualité de la production ne sont pas forcément antagoniques, même si elles relèvent de rationalités à l’origine contradictoires.
Et un autre paragraphe, qui fait particulièrement sens pour moi, en tant que coach d'équipes :
Pour que des accords soient établis entre agents dans un collectif de travail, il faut encore, outre la visibilité : des conditions préalables d’intercompréhension : construction d’un sens commun et communication symbolique médiatisée par le langage, et des conditions propices à la confrontation des opinions sur l’organisation du travail : ce que l’on appelle un « espace de discussion », [...]. L’espace de discussion est indissociable de l’établissement de relations de confiance entre membres d’un collectif. Cet espace de discussion est à la fois un espace de parole et un espace d’écoute. Dans la discipline qu’implique l’espace de discussion, la parole est une prise de risque mais l’écoute l’est aussi.
Bonus :
Sans attendre un papier que je comptais rédiger à son propos, je vous suggère une autre lecture de qualité qui permet un recul supplémentaire sur la situation du sujet humain au travail, et nous interpelle sur ce qui est probablement en amont du plaisir de travailler, l'enjeu du désir de travail :"Existe-t-il un désir de travail ?", communication de Gilles Arnaud et Roland Guinchard au XVIIe Congrès de l’AGRH – Le travail au coeur de la GRH, novembre 2006, Reims
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